Elles sont cinq. Cinq actrices du secteur hospitalier hutois. Cinq belles dames du CHR de Huy, qui ont accepté de témoigner pour livrer ici un portrait inspirant, mais aussi éclairant, sur la crise de la COVID. Elles sont cinq. Mais, derrière elles, c’est une fourmilière qui s’active quotidiennement. Car, comme elles le clament d’une seule voix : « Ce n’est qu’ensemble qu’on pourra vaincre ».
Cet article se veut un hommage à ces femmes et ces hommes courageux qui œuvrent au sein de l’hôpital hutois. Et partout ailleurs. Contre la Covid. Et contre la maladie en général.
Je te présente Cathy, Hélène, Anne, Corinne, et Cécile. Ce sont des femmes, comme toi et moi. Avec une famille, des passions, et des rêves.
Un beau jour de mars, elles se sont retrouvées catapultées sur une planète inconnue et menaçante : La Planète COVID.
Naissance d’une Unité pas comme les autres
Corinne (infirmière en chef dans l’Unité COVID, après la majorité de sa carrière aux soins intensifs) explique, qu’en ce qui la concerne, elle est devenue infirmière en chef du Service d’Orthopédie juste avant la crise sanitaire. Très vite, on a fermé l’Ortho, et on a réquisitionné locaux et personnel pour en faire l’Unité COVID (avec en parallèle un appel aux volontaires, et quelques rares désignations ; mais toujours la possibilité de sortir si on ne s’y sent pas bien) :
« En quelques jours, nous avons réussi à implémenter une unité particulière, qui habituellement prendrait plusieurs mois, et ce, grâce au bouleversement de la vie professionnelle et personnelle de chacun. »
L’objectif de l’Unité COVID ?
« Mettre tout en œuvre pour guérir le patient. Et, si on n’y parvient pas, l’accompagner jusqu’au bout, en lui assurant le maximum de confort de vie et une présence à ses côtés. »
Pour elle, une des difficultés est venue du fait de la grande diversité du personnel soignant, de leurs différentes spécialités, et de leur crainte de l’inconnu. Des agents qui, parfois, n’avaient plus exercé en unité de soins depuis 20 ans. Elle-même est passée d’une équipe de 14 à plus de 60 personnes, avec des compétences et des personnalités très différentes. Un sacré défi ! Mais, elle salue la collaboration, la solidarité, la conscience professionnelle, et l’entraide de toutes les équipes qui ont largement influencé le dénouement de cette situation fort délicate pour tous.
C’est ce que soulignent également Hélène, infirmière en orthopédie-traumatologie reconvertie pour la cause en infirmière en Unité COVID, et Cécile, qui d’infirmière en endoscopie depuis seize ans, s’est intégrée avec bonheur à la Cellule COVID, en tant que personne-relais auprès des familles.
Anne, infirmière aux soins intensifs depuis de nombreuses années, explique :
« C’est la première fois que j’ai vu mon service rempli d’une seule et même pathologie. De la première à la dernière chambre, c’est comme si c’était le même patient. Les paramètres sont les mêmes. La détresse respiratoire aussi. Nous n’avions jamais vécu une telle situation.»
Une Journée sur la Planète COVID
Hélène me décrit sa journée, et m’explique comment les infirmières se répartissent le travail en secteurs, avec chaque fois une « responsable-plateau », qui assure la logistique (médicaments – encodage des données-patients), et les autres qui s’occupent des soins :
« Cela permet le maintien d’une zone « propre », et limite fortement le risque de contamination. »
Cécile, elle, ne fait pas les pauses. Elle prend son service à 9h : elle récupère les données auprès de ses collègues et médecins pour avoir des infos médicales fraîches, vérifie les coordonnées téléphoniques des proches. Puis commencent les appels aux familles : un moment très intense, dans un sens comme dans l’autre… qui se termine vers 17h voire plus tard :
« Mon expérience a été toute nouvelle dans un rôle d’écoute, de savoir parler, de réconforter des personnes inconnues, qui, au bout des appels et des semaines, sont devenues des personnes auxquelles on s’attache sans jamais les voir. Je me sens utile, responsable en tant que personne-relais. Je me dépasse en faisant appel à toutes mes ressources, car ma fonction permet de créer un lien entre les familles et l’hôpital vu qu’il n’y a plus de visite. C’est très réconfortant pour les proches d’avoir un coup de fil, une nouvelle (bonne ou mauvaise), et, de pouvoir transmettre, par nos appels, leur amour aux patients, tellement seuls. »
Deux vagues si différentes
Unanimement, les cinq interviewées mettent en lumière la différence entre les deux vagues.
Lors de la première vague, c’est l’inconnu et la peur afférente qui dominent. « Autour de moi, il y avait des petites souris apeurées qui couraient dans tous les sens… » me décrit Cécile. Face à cette angoisse latente, un seul remède : se tenir les coudes (au sens propre comme au figuré), prendre sur soi et s’investir :
« On a fait un boulot formidable, comme une famille ! Hormis les cas positifs à la Covid, il n’y a quasi pas eu d’absents pour maladie, et personne ne s’est plaint d’être rappelé. J’ai découvert ce qu’est l’esprit d’entreprise» (Hélène).
« On a reçu énormément de dons et de soutien de la part de la population» (Corinne)
« Ce qui est positif, c’est l’entraide : on a vraiment (eu) une chouette équipe en réanimation, dont des stagiaires qui ont fait preuve de très bonne volonté. Mais aussi des médecins renommés qui ont fait les toilettes avec nous, et d’anciens collègues, qui, pour certains avaient quitté le service depuis plus de 10 ans ! Cela m’a aussi permis de faire de nouvelles connaissances avec de belles personnes, qui ont donné le meilleur: Une aventure humaine extraordinaire ! » (Anne)
Cathy, technicienne de surface dans l’Unité COVID lors de la première vague, me confirme que la collaboration avec le personnel soignant a été un succès, et m’explique comment, la bonne humeur entre collègues – « On déconne parfois et ça fait du bien» – fait office de sas de décompression.
Lors de la seconde vague, par contre, « on savait à quoi s’attendre » me dit Hélène.
Ca a été une vague beaucoup plus rapide et puissante que la première, avec une explosion de cas, une saturation des soins intensifs, … Et la crainte de devoir « choisir » comme l’Italie y avait été contrainte six mois plus tôt. Le maître mot : l’adaptation.
Cathy témoigne :
« Alors qu’en Unité Covid, on était toujours à deux, je me suis retrouvée seule aux soins intensifs. Mon travail est devenu beaucoup plus contraignant, avec les règles sanitaires renforcées et des patients parfois très mal, mais on fait ce qu’on peut. »
La seconde vague, et son goût de « Déjà-Vu » charrie un ras le bol de la part des équipes qui s’épuisent. Corinne m’explique son rôle stratégique pour éviter que la démotivation d’un membre du personnel ne se répande comme une traînée de poudre dans le service :
« Je me dois de repérer rapidement la personne avec « un coup de mou », et ensemble, nous trouvons une nouvelle impulsion pour lui donner la force de continuer. J’ai bien conscience que c’est très dur physiquement et psychologiquement pour tout le monde, mais, à la différence d’autres secteurs, nous nous avons la possibilité de travailler. »
Résilience quand tu nous tiens !
En résumé, sur la Planète COVID, on commence à fatiguer…
Mais là encore, l’Humain est plein de ressources et fait preuve d’une incroyable résilience. En effet, c’est avec les yeux pétillants que chacune me confie une anecdote, un bon souvenir, bref, quelque chose qui lui a redonné foi en l’Autre et en la Vie, quand pieds de plombs, tristesse ou colère guettaient.
Anne témoigne :
« Intuber quelqu’un de conscient, lire la souffrance et la peur dans ses yeux, comprendre qu’il (elle) met tout son espoir en vous pour le (la) sauver, c’est une pression énorme. Mais, c’est un tel bonheur de voir les petites attentions des familles à notre égard : pâtisseries, biscuits, cartes. Mais aussi, les lettres des patients sortis : leur reconnaissance nous va droit au cœur. »
Corinne exhibe fièrement la nouvelle déco de son bureau, son cadeau : un énorme cadre sur lequel s’agglutinent les visages de l’équipe COVID, avec une représentation abstraite du « vilain virus ». Une belle reconnaissance.
Hélène, quant à elle, évoque avec bonheur le sourire des personnes âgées qui, dans le cadre du relais patient-famille, touchent pour la première fois une tablette, et découvrent avec émerveillement leurs êtres chers, même virtuels.
Des astuces pour tenir ?
Je demande à chacune ce qui les aide à tenir physiquement et comment elles se ressourcent. Les réponses varient, en fonction du caractère et du vécu :
Corinne m’explique qu’elle est habituée à l’adrénaline de par sa formation et son expérience en soins intensifs, où elle a appris des notions de médecine de catastrophe et d’urgence. Elle puise sa source à ses enfants, mais ne déconnecte jamais vraiment, sachant que la situation est temporaire, et qu’il faut rester (en) alerte. L’air de rien, elle me glisse que sa devise est la citation de Robert HALF :
« La persévérance, c’est ce qui rend l’impossible possible, le possible probable, et le probable, réalisé ».
Tout s’explique 😉
Hélène et Cathy m’assurent qu’elles parviennent aisément à faire la part des choses, quand Anne, reconnaît parfois ramener « du lourd» du travail.
« Ne pas trop lire ce qu’on voit sur les réseaux sociaux aide aussi ».
Cathy ajoute qu’elle parvient à combler le manque de contacts sociaux grâce à ceux créés avec ses collègues.
Cécile s’accorde des moments seule matin et soir, se plonge dans un bon livre, ou passe un coup de fil à une amie : elle veille à ne pas garder pour elle ce qui lui pèse.
Et puis, il y a l’amour du métier, les vitamines, le sport, le grand air, la famille, la clope, le chocolat 😉 …
… Et les pleurs : Entre les pleurs de peur, pleurs de détresse, pleurs de joie, la frontière est mince. On pleure à l’arrivée et au départ. On pleure. Et, c’est salvateur.
Se serrer les coudes, encore et encore
Toutes soulignent encore une fois l’extraordinaire solidarité entre membres du Personnel. Et la bonne ambiance. Ça booste d’œuvrer pour une même cause ! Que ce soit avec des inconnus – qui, à force, n’en sont plus – ou avec des anciens collègues retrouvés. Même le personnel en congé s’y est mis : Envoi de calendriers de l’Avent aux équipes, fabrication de bonnets de Noël, … Entre partage complice des souvenirs « d’Avant », et élaboration inconsciente d’une mémoire collective, l’espoir d’un « Après » renaît.
Ensemble, elles tirent aussi unanimement leur « charlotte » à l’investissement de leur hiérarchie. Que ce soit pour leur avoir accordé un congé bien mérité, mis à disposition les moyens de « vider leur sac » ou offert de laisser une trace (livre d’or, boîte à émotions, Cellule de soutien psychologique au personnel et aux familles, séances de relaxation, immortalisation de cette étrange année au travers des clichés de Sophie François, …)
« Et puis, heureusement, il y a des histoires qui finissent bien ! » relève Anne en souriant. « Parmi elles, cette dame qu’on a finalement pu ne pas intuber, ou notre premier extubé… qu’on a célébré au champagne ! Enfin, depuis presque un mois, le service des soins intensifs est rouvert à d’autres pathologies : cela donne le sentiment d’être à nouveau utile pour tous ».
L’Après sera…
Si elles s’attendent toutes à une troisième vague, Corinne souligne que la charge de travail sera proportionnelle à l’incivisme de la population, et regrette les rassemblements, qui sont un affront aux efforts des équipes.
Hélène, c’est un peu « Le dinosaure » de l’Unité COVID. La terre-à-terre, à la devise-choc : « Vas-y ma grande, un soldat doit aller à la guerre ; tu es infirmière après tout ! » Si, elle, est pensionnée dans trois mois, c’est pour les autres qu’elle appréhende une nouvelle vague :
« Les troupes sont fatiguées physiquement et moralement, et démotivées par les promesses non tenues (ne fut-ce que d’être reconnu comme un métier pénible et lourd) ».
Anne, elle, met beaucoup d’espoir dans le vaccin comme issue à ce tunnel. Elle se réjouit dans l’après de pouvoir serrer sa famille et ses amis dans les bras, faire la fête… Et retourner chez sa coiffeuse 😉
Cathy a hâte de revoir sa grand-mère.
Et moi ? Moi, qui n’y connaissais pas grand’chose à la Covid. Avec juste ma vision externe et limitée : Celle des médias et des réseaux sociaux. Moi, avide de restos, de grandes tablées, de voyages au bout du monde. Je relativise, et j’ai même un peu honte.
Moi, à qui elles ont confié leurs mots, leurs émotions, leurs doutes, leur passion, leur force, leur existence du moment, je crie « MERCI » (et pas qu’à 20 heures !) à ces 5 exceptionnelles Drôles de Dames, et à tous les superhéros et superhéroïnes qui œuvrent sans relâche pour enrayer la propagation de la Covid et des autres maladies.
Et quand Anne referme son témoignage avec « N’oubliez pas de prendre soin de vous et des autres », je me demande qui prend soin d’elle et de ses collègues ?
C’est ainsi que j’ai décidé de montrer mon soutien au personnel hospitalier du CHR de Huy (tous secteurs confondus, inclus les MRS) en proposant GRATUITEMENT une séance de coaching individuelle par personne (femmes ET hommes bienvenus 😉) chez Tell me more entre le 1er décembre 2020 et le 1er mars 2021.
Il suffit de me contacter au 0460/970.357 ou par mail : aj@tellmemore-coaching pour fixer un rdv.
Vous le valez bien ! ♥
j’ai été hospitalisée dans le service covid pendant 11 jours et j’ai été suivie par une équipe au top gentillesse rires soins…je vous dit encore un énorme merci pour tout madame baumont françoise
Merci pour votre témoignage♥
Félicitations a vous toutes et tous … (et le mot est fort faible )
Merci pour elles ♥
Merci pour ce reportage tellement émouvant à lire.
Une grande reconnaissance pour le dévouement et les soins et l attention aux malades.
A tout le service quel qu il soit, je dis tout simplement MERCI❤👏
Merci à vous pour votre réaction chaleureuse et encourageante pour tous ♥
Cécile avec ton grand cœur ça ne m’étonne pas ❤️
N’est-ce pas? 😉 Merci pour elle ♥